Usage de timbre ayant déjà servi

Depuis la création du timbre-poste et durant tout le XIXᵉ siècle, la Poste a toujours redouté la réutilisation des timbres-poste. La Poste dépendant à l'époque du ministère des Finances, la fraude postale pouvait représenter un manque à gagner considérable pour les recettes de l'État. Pour pallier cela, l'administration a mis en place une série de mesures techniques (timbres oblitérants, encre d'imprimerie pour l'oblitération, etc.) ainsi que des mesures pénales, la fraude postale étant alors considérée comme un délit passible de condamnation. Les losanges chiffrés facilitaient la détection de la réutilisation de timbres déjà oblitérés. En effet, la correspondance entre le timbre à date du bureau de départ d'une lettre et le losange chiffré pouvait être vérifiée rapidement.

Toute personne reconnue coupable d'une telle fraude était passible de poursuites devant un tribunal correctionnel. Voici un cas d'utilisation d'un timbre-poste déjà oblitéré. Pour appuyer les documents présentés, j'ai joint les articles de l'Instruction Générale sur le service des Postes de 1856. À l'époque, elle faisait office de 'Bible' pour les postiers.

Le dossier ne comporte pas cette enveloppe chargée modèle 1198, ce qui est normal, car celle-ci n'est destinée qu'à être conservée provisoirement.

Parallèlement à cet envoi, un avis d'émission d'une lettre revêtue d'un timbre-poste présumé frauduleux (modèle 1197) a été envoyé en double à l'Administration à Paris et à l'Inspecteur Départemental des Postes à LILLE.

A ORCHIES, le pli chargé a été réceptionné avec toutes les précautions qu'impose la procédure :

Lettre de VALENCIENNES pour ORCHIES datée du 24 juin 1856. Les postiers de VALENCIENNES ont constaté que le timbre portait des traces d'une oblitération antérieure et l'ont donc signalé par la mention "taxée pour timbre ayant déjà servi". La lettre a ensuite été taxée comme non affranchie.

La lettre est envoyée sous pli chargé au bureau d'ORCHIES.

Dans le cas présent, nous sommes dans une situation un peu particulière, car il s'agit d'une lettre adressée à une personne pour être remise à une autre. La Poste a néanmoins prévu ce cas de figure.

Le Sieur Durez, courrier d'entreprise de profession, accepte de venir au bureau de poste le jour même. Au bureau de poste, on l'attend pour remplir un procès-verbal.

Le PV est signé par le Directeur, le destinataire (ou son représentant) ainsi qu'un assistant. Cet assistant doit être assermenté et appartenir dans tous les cas à l'Administration des postes.

Le procès-verbal nous apprend aussi que l'expéditrice de la lettre, une certaine Honorine Chopin, habitait VALENCIENNES.

Les pièces du dossier ont alors été envoyées à l'Inspecteur des postes du Département d'origine de la lettre.

Là, prend fin la procédure postale et commence la procédure pénale.

L'Administration par le biais de l'Inspecteur Départemental va déposer plainte auprès du Procureur Impérial de l'Arrondissement de VALENCIENNES (dont VALENCIENNES fait partie).

Cette plainte a été déposée via le document ci-joint :

Honorine Chopin a été convoquée et entendue au commissariat de police de VALENCIENNES le 4 juillet 1856. Elle reconnait avoir écrit la lettre et l'avoir affranchie. Cependant, elle nie avoir utilisé un timbre déjà oblitéré : "[...] mais ce timbre ne pouvait être oblitéré. Je l'avais acheté avec plusieurs autres que j'avais dans ma malle. Celui-là était le dernier qui me restait. Je reconnais avoir marché dessus un jour qu'en tirant de ma malle des papiers dans lesquels il était, il est tombé par terre [...]".

Un mois après l'envoi de la lettre, Honorine Chopin a comparu devant le Tribunal Correctionnel de VALENCIENNES qui l'a reconnue coupable d'utilisation d'un timbre-poste ayant déjà servi et qui l'a condamnée à payer 7,25 fr d'amende et de frais de justice, tout cela assorti d'une contrainte par corps.

Une lettre d'avertissement a été ensuite envoyée le 25 juin au destinataire, l'invitant à se rendre au bureau de poste pour reconnaître la lettre. Le secret de la correspondance est sacré. La Poste ne pouvait ouvrir les lettres (sauf sous certaines conditions).

De plus, c'était une invitation et non une sommation.

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