Marques postales et tarifs

Marques postales

La Lettre-Timbre et son Rôle dans la Poste Rurale au XIXᵉ Siècle.

Dès 1830, avec la mise en place de la poste rurale, les lettres-timbres furent utilisées pour organiser et suivre les tournées des facteurs ruraux. Ces empreintes, attribuées aux communes en fonction du parcours de la tournée fixé par l’Administration, jouaient un rôle central dans le contrôle et le suivi des services postaux en zone rurale. Les lettres timbres étaient installées dans les boîtes aux lettres. 

Attribution des Lettres-Timbres.

Les communes étaient identifiées par des lettres alphabétiques, attribuées dans l’ordre des étapes de la tournée du facteur :

La première commune portait la lettre A, la suivante B, et ainsi de suite.

Dans les cas où un bureau couvrait un large territoire nécessitant plusieurs tournées de facteurs, l’indexation se poursuivait là où la tournée précédente s’arrêtait. Par exemple, si la tournée n° 1 d’un bureau se terminait à M, la tournée n° 2 reprenait avec la lettre N.

Certaines communes particulièrement vastes ou générant un trafic postal important disposaient de plusieurs boîtes aux lettres. Dans ces cas, les lettres-timbres des boîtes supplémentaires étaient complétées par un chiffre pour les distinguer. Lorsque le nombre de communes dépassait les 26 lettres de l’alphabet, certaines lettres étaient doublées pour identifier toutes les localités.

Usage de la Lettre-Timbre par les Facteurs.

Au début de la mise en place de la poste rurale, jusqu’en 1836, les facteurs ruraux devaient apposer l’empreinte de la lettre-timbre sur un document appelé part. Le part servait à enregistrer toutes les empreintes des lettres-timbres dans l’ordre exact de la tournée imposée par l’Administration. Une fois la tournée achevée, le facteur remettait ce document au bureau de poste pour prouver qu’il avait bien desservi toutes les communes prévues.

À partir du 19 novembre 1835, le Règlement sur la constatation des taxes des lettres imposa une nouvelle pratique : les facteurs ruraux devaient désormais apposer la lettre-timbre dans le coin supérieur droit de chaque lettre recueillie dans les boîtes aux lettres.

Confusion entre Lettres-Timbres et Cachets de Facteur.

Bien qu’on les désigne parfois comme des cachets de facteur, les lettres-timbres étaient en réalité des cachets de boîtes. Le véritable cachet de facteur est le timbre portant l’inscription "OR" (Origine Rurale), qui servait à d’autres usages.

Boîtes Rurales Supplémentaires.

Dans certaines localités, où le territoire était particulièrement étendu ou le volume postal élevé, des boîtes rurales supplémentaires étaient installées. Ces boîtes disposaient de lettres-timbres spécifiques, souvent associées à un chiffre pour les différencier. Dans certains cas, lorsque le nombre de communes d’un arrondissement dépassait les lettres disponibles de l’alphabet, des doublons étaient utilisés pour combler cette limite.

Exemple de part de facteur modèle 1832
Exemple de part de facteur modèle 1832
Lettre-timbre de boîte rurale
Lettre-timbre de boîte rurale
Lettre-timbre de boîte rurale supplémentaire
Lettre-timbre de boîte rurale supplémentaire

Lettre-timbre de boîte rurale

Lettre-timbre de boîte rurale supplémentaire

Le Timbre OR : Origine Rurale.

Le timbre OR, signifiant "Origine Rurale", était un outil essentiel dans le service postal rural. Il est mis en service par la circulaire n° 64 du 9 juin 1836 Ce timbre, que le facteur conservait dans sa sacoche, servait à identifier les correspondances qui lui étaient remises en mains propres durant sa tournée. Lorsque le facteur recevait une lettre directement d’un usager, il devait apposer le timbre OR sur celle-ci pour en marquer l’origine.

Évolution de l’usage du Timbre OR.

À partir du 1ᵉʳ février 1851, une nouvelle consigne élargit l’utilisation du timbre OR. Si un facteur trouvait, dans une boîte aux lettres rurale, une lettre déjà affranchie avec des timbres-poste et destinée à être distribuée en cours de tournée, il devait alors oblitérer les timbres avec son timbre OR. Cette pratique remplaçait l’usage de la lettre-timbre de la boîte rurale pour ce type de correspondance. Cette directive fut détaillée dans la circulaire n° 56 du 27 février 1851.

Timbre OR
Timbre OR

Le Timbre du Décime Rural Supplémentaire.

Le timbre du décime rural supplémentaire était un élément central du service postal rural, il matérialisait la taxe destinée à couvrir les frais supplémentaires liés à la distribution dans les communes sans bureau de poste. Ce timbre, utilisé du 1ᵉʳ avril 1830 au 31 décembre 1846, devait être apposé sur toutes les lettres provenant ou destinées à une localité rurale dépourvue de bureau.

Cependant, ce timbre n’était pas requis pour les correspondances circulant à l’intérieur de l’arrondissement rural d’un bureau, c’est-à-dire entre la ville où se situait le bureau de poste et les localités dépendantes de ce bureau.

Règles d’Application et Couleurs.

Le décime rural supplémentaire devait être apposé dans une seule des deux couleurs suivantes, selon la provenance ou la destination de la lettre :

Rouge : Lorsque la lettre provenait d’une localité sans bureau de poste.

Noir : Lorsque la lettre était destinée à une localité sans bureau de poste.

La règle stipulait que le timbre ne pouvait être appliqué qu’une seule fois, même si une lettre provenait d’une localité sans bureau et était destinée à une autre localité également sans bureau.

Dotation et Usage selon l’Instruction de 1834 (Instruction sur le service des Distributeurs).

L’instruction spéciale sur le service des Distributeurs d’avril 1834, dans son article 21, précisait que chaque bureau devait être équipé de deux timbres de décime rural :

L’un pour le timbrage en rouge, utilisé pour les lettres en provenance des localités rurales.

L’autre pour le timbrage en noir, utilisé pour les lettres destinées aux localités rurales.

Cette double dotation garantissait une application conforme des timbres selon les règles définies par l’Administration.

Timbre du décime rural
Timbre du décime rural

Le Timbre CL : Correspondance Locale.

Le timbre CL (Correspondance Locale) était utilisé pour identifier toutes les lettres circulant en port dû à l’intérieur d’un même arrondissement rural. Cette marque comptable jouait un rôle essentiel dans la gestion du courrier local, en simplifiant le suivi et la répartition des correspondances.

Usage et Évolution du Timbre CL.

De 1830 à 1832 : Le timbre CL était également utilisé dans les bureaux de Direction et Distribution, où il servait à marquer les lettres locales.

Après 1832 : L’utilisation du timbre CL dans les bureaux de Distribution fut remplacée par le timbre CD, tandis que le timbre CL continua d’être employé par les Directions pour les lettres locales dans les arrondissements ruraux.

Marque Comptable.

Le timbre CL était avant tout une marque comptable, destinée à garantir une traçabilité des lettres en port dû et à faciliter les calculs liés aux recettes générées par ces correspondances.

Fin de l’utilisation.

L’utilisation du timbre CL cessa définitivement en décembre 1858, marquant la fin de son rôle dans le système postal rural.

Timbre CL
Timbre CL

Le Timbre CD : Correspondance de Distribution.

Le timbre CD (Correspondance de Distribution) fut mis en service en 1832. Il avait pour fonction de marquer toutes les lettres en port dû circulant à l’intérieur de l’arrondissement rural d’une Distribution. Ce timbre jouait un rôle important dans la gestion et le suivi des correspondances locales, bien qu’il ait eu un usage limité.

Une Utilisation Rare.

À la différence du timbre CL (Correspondance Locale), le timbre CD est considéré comme peu commun. En effet, le volume de courrier circulant au sein des arrondissements des Distributions était généralement faible.

Mise en Service et Mention Réglementaire.

Contrairement à d’autres timbres de la période, aucun règlement précis officialisant la mise en service du timbre CD n’a été retrouvé à ce jour. Cependant, son existence et son usage sont confirmés par l’Instruction Générale sur le service des postes de juin 1832. Cette dernière mentionne le timbre CD dans :

Le chapitre II, qui détaille les pratiques relatives au service postal dans les Distributions.

L’article n° 81, qui énumère la liste du matériel que chaque bureau de Distribution devait posséder.

Fin de l’Utilisation.

Comme le timbre CL, l’utilisation du timbre CD prit fin en décembre 1858, marquant la fin d’une ère dans la gestion des correspondances locales au sein des arrondissements ruraux.

Timbre CD
Timbre CD

Les Boîtes Urbaines Supplémentaires et leurs Lettres-Timbres.

Dans les faubourgs des villes, il n’était pas rare de trouver une ou plusieurs boîtes urbaines supplémentaires, destinées à faciliter la collecte du courrier pour les habitants éloignés du bureau central. Ces boîtes étaient qualifiées de "supplémentaires" en raison de leur emplacement éloigné par rapport au centre-ville.

Caractéristiques des Lettres-Timbres de Boîtes Urbaines Supplémentaires.

Les lettres-timbres associées à ces boîtes se distinguent par leur entourage carré, les rendant facilement identifiables. Ce détail visuel permettait de différencier le courrier collecté dans les boîtes urbaines supplémentaires de celui recueilli dans d’autres boîtes.

Lorsque le facteur relevait ces boîtes, il avait pour consigne d’apposer l’empreinte de la lettre-timbre sur :

Son part – le document de suivi utilisé pour prouver qu’il avait effectué sa tournée.

Les courriers relevés, afin de signaler leur provenance et de les intégrer dans le circuit postal.

Apparition des Lettres-Timbres de Boîtes Urbaines Supplémentaires.

L’utilisation des lettres-timbres spécifiques aux boîtes urbaines supplémentaires débuta en 1852. Ces dispositifs répondaient à la nécessité d’améliorer l’organisation postale dans les zones urbaines en pleine expansion et de mieux desservir les quartiers excentrés.

Lettre-timbre de boîte urbaine supplémentaire
Lettre-timbre de boîte urbaine supplémentaire

Lettre-timbre de boîte urbaine supplémentaire

Le Timbre OL : Origine Locale.

Le timbre OL, signifiant "Origine Locale", était un outil indispensable pour les facteurs de ville. Conservé dans leur sacoche, ce timbre devait être apposé sur toutes les lettres remises directement au facteur pendant sa tournée. Il servait à marquer ces correspondances et à indiquer qu’elles provenaient de la zone desservie par le facteur.

Une apparition tardive.

Contrairement à une croyance répandue, le timbre OL n’a pas été introduit en même temps que le timbre OR (Origine Rurale) en 1836. Sa mise en service date de juillet 1868, comme en témoigne l’Instruction Générale sur le service des postes publiée à cette époque. Son introduction répondait à un besoin spécifique de différenciation et d’organisation dans le traitement des courriers locaux.

Deux Variantes de Timbres OL.

Le timbre OL se distingue par ses deux variantes, qui reflètent le type de facteur qui l’utilisait :

Cercle continu : Utilisé par les facteurs de ville, responsables des zones urbaines principales.

Cercle pointillé : Employé par les facteurs locaux, qui desservaient des zones plus périphériques ou faubourgs.

Timbre OL – facteur de ville
Timbre OL – facteur de ville
Timbre OL – facteur local
Timbre OL – facteur local

Facteur de ville

Facteur local

Exemple de part de facteur modèle 1832

Les grilles de tarifs

A l'intérieur d'une même ville:

  • A partir du 22 mars 1800.

Pas de différence entre le port payé et le port dû.

  • A partir du 1er janvier 1863.

Lettre chargée: + 20 c.

Valeur déclarée: Port + 20 c de chargement + 10 c par fraction de 100 fr.

  • A partir du 1er septembre 1871.

Lettre chargée: + 50 c.

Lettre recommandée: + 50 c

Valeur déclarée: Port + 50 c de chargement + 20 c par fraction de 100 fr.

  • A partir du 1er janvier 1876.

A l'intérieur d'une circonscription postale:

  • A partir du 1er avril 1830.

Lettre chargée: + 20 c.

Valeur déclarée: Port + 20 c de chargement + 10 c par fraction de 100 fr.

  • A partir du 1er janvier 1863.

Il n'y a pas de différence de tarif entre le port dû et le port payé.

Taxe supplémentaire de 1 décime (10 c) pour les lettres circulant entre 2 arrondissements postaux.

  • A partir du 1er septembre 1871.

Lettre chargée: + 50 c.

Lettre recommandée: + 50 c

Valeur déclarée: Port + 50 c de chargement + 20 c par fraction de 100 fr.

  • A partir du 1er janvier 1876.

Les tarifs spéciaux :

Au 1ᵉʳ mars 1829 : imprimés ouverts jusqu'à 11 dm²(inclus) : 5 c. Double port si plus de 11 dm².

Au 1ᵉʳ janvier 1847 : Suppression du décime rural supplémentaire.

Au 1ᵉʳ janvier 1849 : Lettre chargée ou recommandée : double port (port payé obligatoire).

Au 1ᵉʳ juillet 1850 : Lettre chargée : double port (port payé obligatoire). Lettre recommandée : + 25 c (port payé non obligatoire)

Au 31 décembre 1852 : Imprimés sous enveloppe ouverte (avis, cartes de visites): 5 c

Au 1ᵉʳ juillet 1854 : Lettre chargée : + 25 c. Recommandation supprimée.

Au 1ᵉʳ août 1856 : Imprimés sous enveloppe ouverte (avis, cartes de visites) : 5 c jusque 10 g inclus. (+ 5 c par 10 g supplémentaires).

Du 1ᵉʳ avril 1830 au 31 décembre 1846, les lettres circulant entre 2 arrondissements ruraux faisant partie de la même circonscription postale supportent une taxe fixe de 1 décime en plus du port.

Ainsi une lettre circulant entre la ville du bureau de Direction et une commune dépendant d'un bureau de Distribution (dépendant de cette Direction) sera taxée à 10 c pour le port (moins de 7,5 g) plus 10 c (décime rural supplémentaire). Le décime rural représentait pour le courrier local un surcoût important et il n'était pas rare que les habitants des communes rurales essaient de contourner le système pour éviter de payer cette taxe supplémentaire.

Il n'était pas rare non plus que les préposés à la taxation des lettres se trompent dans l'application ou non du décime rural supplémentaire.

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