Ballons montés de Lille
On peut rencontrer des lettres à destination de PARIS traitées par le bureau de LILLE pendant la 2ᵉ quinzaine de février 1871. Certaines lettres portent même la mention "par ballon monté". Elles ont été le plus souvent écrites à la fin 1870 et sont originaires de lieux très éloignés de LILLE.
L'histoire des ballons montés de LILLE est peu connue.
Lettre écrite à DRUCOURT (Eure) le 12 novembre 1870. Traitée à LILLE le 23 février 1871.
Durant le siège de PARIS en 1870-1871, il était relativement aisé de faire sortir du courrier de la capitale via les ballons montés. Au total, du 23 septembre 1870 au 28 janvier 1871, 55 ballons ont pu emporter du courrier avec eux. Dans l'autre sens, vers PARIS, les choses étaient beaucoup plus compliquées, même si l'Administration a essayé par tous les moyens de créer des liaisons postales vers la capitale.
Moniteur Universel du 27 octobre 1870.
Le télégraphe d'abord, mais les câbles vers PARIS ont été coupés par les allemands et les différentes tentatives de reconnexion ont échouées.
Le service par pigeons voyageurs emportant des dépêches microphotographiques fût ouvert au public par le décret du 4 novembre 1870 (Bulletin mensuel des postes n° 28, juillet 1871). Cependant, le nombre de pigeons pouvant parcourir de longues distances était limité. De plus, l'hiver et la réduction de la durée du jour impactait les performances des pigeons.
Enfin, l'idée d'utiliser les ballons venant de PARIS pour les y faire retourner est apparue, mais les ballons de l'époque n'étant pas encore dirigeables, le retour vers la capitale était soumis aux caprices des vents.
De plus, les zones occupées par les Allemands autour de PARIS s'agrandissaient de jour en jour rendant le départ d'une ville assez proche de PARIS de moins en moins envisageable. Rajouté à cela que cette ville devait être dotée d'une usine à gaz assez performante pour remplir rapidement le volume d'un ballon.
Le 9 novembre néanmoins, l'Administration des postes faisait paraître dans le Moniteur Universel l'avis ci-contre.
Lettre en port dû écrite à MARSEILLE le 16 novembre 1870. Traitée à LILLE le 25 février, elle est arrivée à PARIS le 27 février.
Extrait de l'avis paru dans le Moniteur Universel de BORDEAUX le 21 décembre 1870 (Bulletin mensuel des postes n° 28 juillet 1871).
A vrai dire, cet avis ne mettait pas fin aux tentatives de retour vers PARIS, car d'autres moyens furent testés par la suite, comme les boules de MOULINS. On peut même penser que cet avis avait aussi un but de désinformation de l'ennemi. En effet, les Allemands avaient connaissance des tentatives menées pour rétablir les communication avec PARIS. François-Frédéric Steenackers (Directeur général des télégraphes et des postes), nous dit dans son ouvrage [1] "Ce second avis [celui du 27 octobre] était une affaire d'ordre, en quelque sorte une recommandation de discrétion aux inventeurs et à la presse. Hélas! je prêchais dans le désert. Les journaux - sans mauvaise intention, j'en suis certain - donnaient les récits des voyages en ballon, des essais de retour, etc, etc, et ceux-là même qui avaient le plus d'intérêt à garder le silence, divulguaient, malgré toutes nos prières, le secret à qui Ies voulait entendre".
Une grande quantité de courrier s'était accumulée, suite aux avis des 27 octobre et 9 novembre et aucun moyens efficace n'avait pu l'envoyer vers la capitale.
A PARIS, le ministre des travaux publics Dorian chargeait Bunelle et De Fonvielle d'organiser avec la délégation du gouvernement à TOURS une tentative de retour vers PARIS.[2]
De Fonvielle et Bunelle se connaissaient bien. Bunelle qui avait créé pendant le siège une société privée affrétant des ballons pour des personnes privées, avait recruté De Fonvielle. Tous deux avaient quitté PARIS le 24 novembre 1870 à bord du ballon l'Egalité avec 3 passagers et une missive du ministre Dorian à l'attention de Steenackers. De LOUVAIN (Belgique), où le ballon était tombé, Bunelle se dirigea vers TOURS, pendant que De Fonvielle allait en Angleterre.
Arrrivé à TOURS, Bunelle télégraphiait le 1ᵉʳ décembre à l'un de ses amis à PARIS: "bien portant, voyage accidenté, reçu mission aéronautique importante […]". [3]
Cette mission importante, c'était de créer une station aérostatique dont il deviendrait le chef. Cette station a été installée à LILLE début janvier 1871 dans des bâtiments mis à disposition par la mairie de LILLE.
Extrait du journal la Liberté (MONTPELLIER) du 13 janvier 1871. Bunelle y est dénommé Brunel.
Au départ, elle était pourvue de 3 ballons ramenés de BORDEAUX après un long périple maritime. Par après, tous les ballons tombés proches du Nord et en Belgique, dont le Duquesne (ballon avec nacelle à hélice) ont été intégrés à la flotte lilloise. A priori et selon De Fonvielle, l'objectif de cette station était de pouvoir mettre en relation l'Armée du Nord (dont le quartier général était à LILLE) et PARIS.
Aucune communication n'a été faite auprès du public concernant cette initiative. L'Administration s'est contentée de diriger vers LILLE une partie du stock de lettres à destination de PARIS qui avait été rassemblé à TOURS. C'est pour cela que certaines lettres traitées à LILLE portent la mention "par ballon" ou "ballon monté" (suite à l'avis du 9 novembre 1870).
Le personnel de la station aéronautique de LILLE n'a pas pu réaliser de tentative de lancement de ballon, les vents de janvier étant défavorables. Les conditions se sont améliorées fin janvier, mais l'Armistice signé le 28 janvier a rendu inutiles la station de LILLE ainsi que ses ballons.
Bunelle resta à LILLE quelque temps et effectua quelques ascensions à but caritatif, mais dû fermer la station le 22 février 1871.
Le courrier rassemblé à LILLE fut acheminé à Paris entre le 14 et le 28 février 1871 (dates constatées sur les timbres à date de LILLE).
[1] Les télégraphes et les postes pendant la guerre de 1870-1871, page 491. François-Frédéric Steenackers, 1883.
[2] Le spectateur militaire. Henri Noirot, page 162. 1890.
[3] Recueil des dépêches télégraphiques reproduites par la photographie et adressées à Paris au moyen de pigeons voyageurs, Tome IV.
Pourtant, plusieurs tentatives, depuis CHARTRES le 20 octobre, depuis ROUEN les 7 et 8 novembre avec le Jean-Bart piloté par les frères Albert et Gaston TISSANDIER n'ont pas fonctionné. Un autre ballon fit des essais à partir d'AMIENS dans la première dizaine de novembre, mais là aussi sans succès.
Lettre écrite à RENNES le 21 octobre 1870. Traitée à TOURS le 23 novembre 1870 suite à l'avis du 9 novembre en vue d'un départ proche. Comme il s'est avéré que les tentatives de retour vers PARIS ont été suspendues dès la fin de novembre, la lettre a été conservée à TOURS jusqu'aux tentatives lilloises.
Face à l'évidence, l'Administration faisait paraître dans le Moniteur Universel du 21 décembre 1870, l'avis suivant: