Création du Chiffre-Taxe
Le contrôle de la perception des taxes sur le courrier local était une préoccupation importante pour l'Administration. Elle ne pouvait pas installer un inspecteur dans tous les bureaux de Direction (seuls les gros en étaient pourvus). Les erreurs ou les malversations étaient souvent découvertes après un temps plus ou moins long.
Par la décision du Ministre des Finances du 14 octobre 1858 et l'arrêté du 15 novembre 1858, l'Administration allait mettre fin ou en tout cas considérablement freiner ces erreurs ou malversations. En effet, le 1ᵉʳ janvier 1859, allait être mis en service le Chiffre-Taxe. Celui-ci devait servir à taxer les lettres en port dû.
Ces timbres étaient évidemment comptabilisés, l'Administration en tenait un inventaire ainsi que le bureau qui les recevait.
Au 1ᵉʳ janvier 1859, les Chiffres-Taxe ne pouvaient être utilisés que dans l'Arrondissement Rural du bureau de poste. Les correspondances circulant entre 2 Arrondissements ruraux d'une même Circonscription postale devaient toujours être taxées à la main. Le succès de cette mesure a porté l'Administration à étendre l'utilisation du Chiffre-Taxe à la Circonscription Postale par l'arrêté du 25 avril du 1859 (applicable au 1er juin).
1859 : Lettre du QUESNOY pour GOMMEGNIES commune rurale dépendant du QUESNOY. Ici aussi, le Chiffre-Taxe est au type lithographié.
La circulaire n° 106 de décembre 1858 (BM n° 40) nous apprend que l'oblitération réglementaire des Chiffres-Taxe est le timbre à date du bureau ou le timbre OR du facteur rural. On y dit même qu'une seule frappe du timbre à date suffit et qu'il est inutile d'apposer une seconde frappe sur la suscription des lettres. La circulaire n° 124 d'avril 1859 indique qu'à partir du 1er juin 1859 les lettres de la ville pour la ville pouvaient être taxées au moyen de Chiffres-Taxe et que ces derniers devaient être oblitérés au moyen du timbre à date, mais qu'il fallait apposer une deuxième frappe sur la suscription.
1859 : Lettre de et pour MAUBEUGE datant de février 1859. A cette date, les Chiffres-Taxe ne peuvent être utilisés qu'un sein de l'Arrondissement rural d'un bureau.
Ce Chiffre-Taxe a été imprimé en lithographie. Le court délai entre le décret et la date de mise en service prévue de ces timbres a obligé l'Administration à recourir à un moyen d'impression rapide. On reconnait le type lithographié à la mention "à percevoir" qui est très fine. Sur le type typographié qui apparait en février 1859, l'impression est plus épaisse. Avant le 1er juin 1859, les lettres de la ville pour la ville ne devaient pas porter de Chiffre-Taxe.
1860 : Lettre de VALENCIENNES pour ST SAULVE pesant 15 g. Ici, le bureau de VALENCIENNES est en irrégularité, puisqu'il annule les Chiffres-Taxe avec son losange oblitérant, alors que depuis le 1ᵉʳ juin 1859, il est censé les annuler avec son timbre à date.
Si les Chiffres-Taxe pouvaient figurer sur la correspondance entre une Distribution et une Direction de la même Circonscription Postale, ils étaient toujours apposés et annulés par la Direction même si la lettre était originaire de la Distribution (§ 2 de la circulaire n° 124).
1860 : Lettre postée au bureau de Distribution d'ETROEUNGT pour AVESNES (bureau de Direction). A partir du 1ᵉʳ juin 1859, les Chiffres-Taxe pouvaient être utilisés sur le courrier local circulant entre 2 Arrondissements ruraux.
A la mise en place du service rural en 1830, un facteur rural ne pouvait pas distribuer les lettres dans les faubourgs des villes, même s'il y passait pour se diriger vers sa tournée.
L'instruction générale de 1832 et son article 546 visait à bien séparer les 2 services, local et rural. Le facteur rural devait se charger des lettres dont la plupart supportaient le décime rural supplémentaire, alors que le facteur de ville ou le facteur local ne se chargeait que de la correspondance supportant uniquement le port local. En janvier 1847, le décime rural supplémentaire n'existant plus, il était difficile de justifier la présence 2 facteurs, l'un local, l'autre rural dans la même localité ou le même faubourg, l'un réalisant sa tournée (le facteur local), l'autre ne faisant que passer (le facteur rural).
Peu à peu, les nécessités de service au niveau local ont fait qu'il y a eu des adaptations et que les facteurs ruraux ont pu s'occuper des localités où se trouvait un bureau où alors des faubourgs d'une ville étendue.
Aujourd'hui, on s'imagine les faubourgs d'une ville assez peuplés et urbanisés. Au XIXᵉ siècle, les faubourgs d'une ville pouvaient alterner des zones peuplées et des zones encore très rurales.
La circulaire n° 324 d'avril 1847, après avoir rappelé l'article 546 de l'Instruction générale de 1832, autorise finalement la desserte par les facteurs ruraux des écarts des villes à conditions que ceux-ci se situent extra muros.
1862 : Lettre écrite dans le hameau de Frais-Marais et destinée à la commune rurale de WAZIERS. Le Hameau de Frais-Marais faisait partie intégrante de la ville de DOUAI alors que WAZIERS était une commune rurale indépendante. L'un des facteurs ruraux du bureau de DOUAI desservait donc Frais-Marais aussi bien que WAZIERS dans une même tournée. Par ailleurs, Frais-Marais et WAZIERS sont limitrophes. Frais-Marais possédait une boîte aux lettres urbaine (dite supplémentaire) avec l'indicatif G.
Le Chiffre-Taxe aurait dû être oblitéré par le timbre OR du facteur.
Enfin, l'Administration avait prévu le cas où les Chiffres-Taxe apposaient sur les lettres ne pourraient être recouvrés. La circulaire n° 106 de décembre 1858 et notamment le paragraphe 44 nous dit :
"Il arrivera souvent que la valeur des Chiffres-taxe apposés sur les lettres ne pourra être recouvrée, et que ces lettres devront être renvoyées, soit en rebut, soit sur une nouvelle destination.
Règle générale, tout Chiffre-Taxe appliqué sur une lettre qui, pour une cause quelconque, n'aura pu être distribuée, sera annulé une seconde fois, par deux forts traits de plume tirés en croix +, et la taxe que ce Chiffre-Taxe représentait sera rétablie sur la lettre à la main."
Le mode opératoire imposé par la circulaire n° 106 était compliqué et beaucoup de bureaux ne l'ont pas appliquée complétement, notamment en ne rétablissant pas à la main la taxe qu'exprimait le Chiffre-Taxe.
1860 : Lettre en port dû postée à ROUBAIX pour ROUBAIX. Le destinataire se trouvant à SASSEGNIES près de BERLAIMONT, la lettre a donc été renvoyée en port territorial, de ce fait taxée à 30 c.
Cette lettre présente l'application parfaite de ce qui était demandé par la circulaire n° 106.